mardi 12 janvier 2010

Comment éviter un nouvel éclatement de la finance ?

L'argent public a été investi dans les circuits financiers pour éviter leur effondrement. La situation antérieure à la crise de juillet 2008 se reconstitue, mais avec des Etats plus endettés, donc des marges de manoeuvre interventionnistes resserrées.
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Comment éviter de reproduire les mêmes errements financiers ? Comment éviter un nouvel éclatement ?


Je résume en quatre questions :


Question 1 : Quelle est la situation ?


Il y a excès de liquidités circulantes du fait d’un maintien des taux bas.

L’excès de liquidités facilite la déconnection entre la valeur de spéculation et la valeur intrinsèque.

Par exemple, le prix d’acquisition d’une PME non cotée en Bourse est en moyenne de 7 fois sa marge annuelle. Si les entreprises du CAC 40 étaient cotées sur cette base, le CAC 40 oscillerait autour de 2400 points. Mais dans la réalité, le CAC 40 est descendu au plus bas à 2465 points après son effondrement et reprend son rallye haussier.

Source du graphique : Boursorama


Or l’argent n’est pas une valeur en soi, il est une représentation de la valeur intrinsèque. L’argent mis en circulation est surabondant par rapport à la valeur intrinsèque. Il se place donc tantôt dans les sociétés internet, tantôt dans l’immobilier, tantôt dans les matières premières. Les masses d’argent surabondantes se déplacent de façon erratique, et la bulle éclate à chaque fois puisque le prix est détaché de la valeur intrinsèque.

Question 2 : Comment en est-on arrivé là ?


Les banques de second rang payent toutes leur argent au même taux auprès des banques centrales. Ce qui fait que les banques qui prennent plus de risques se font en réalité financer leur risque par les banques plus prudentes, et en fin de compte par l'argent public (d'ailleurs, les banques se prêtent entre elles en prenant en compte ce risque, d'où la crise des prêts interbancaires).

Comme le risque est collectivisé, les banques peuvent emprunter sans entraves par exemple à 2% pour placer à 12%, sans tenir compte des règles prudentielles, et quels que soient leurs fonds propres.



Question 3 : Comment faire payer le risque ?


Comment faire payer le risque pour sortir de ce collectivisme, et restaurer la responsabilité propre aux mécanismes de marché ?

La meilleure mesure du risque global pris par une banque est le rapport entre ses fonds propres et ses encours.

Donc je propose que les banques centrales appliquent aux banques de second rang un taux directeur proportionnel au rapport entre l’encours et les fonds propres.

Chacun paie son risque.
Et pour tenir compte du risque global d'excès de masse monétaire, je propose d'intégrer au calcul de taux le rapport entre la masse monétaire et le PIB.


Question 4 : Comment faire quand le risque de faillite bancaire se réalise ?
La deuxième proposition que je fais, est que la majoration de taux appliquée aux banques à risque alimente le Fonds de Garantie des Dépôts Bancaires.

En cas de faillite de la banque, la banque est soit revendue à une banque plus saine, soit mise en faillite avec remboursement des clients par le Fonds de Garantie.
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Application chiffrée
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Sur la base des mesures de masse monétaire M3 depuis les années 60, on voit que le point critique d'une masse monétaire M3 est de 80% du PIB. Au-delà de ce montant, c'est la création d'une méga bulle, avec les conséquences que l'on sait maintenant.
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Le point d'équilibre critique est donc:
(10 x M3) /(8 x PIB) = 1
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Sur le sujet des ratios bancaires de fonds propres, on peut observer que les accords de Bâle II ont transformé une part du contrôle bancaire en ... un auto-contrôle !!! Le ratio Mac Donough, validé par ces accords, permet de cacher la misère sous le tapis.
En tout état de cause, les travaux de Bâle II se sont arrêtés sur un consensus de ratio fonds propres sur encours de 8%. Même si les autres conclusions de Bâle II sont insupportables en termes de probité du contrôle, retenons au moins ce point.
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Le point d'équilibre critique est donc :
(8 x Fonds Propres) / Encours = 1
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Je propose que la rémunération de référence des banques centrales soit de 0,1% des avances aux banques de second rang.
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Je propose que le taux directeur devienne un taux directeur bancaire.
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Je propose de construire le taux directeur bancaire comme suit :
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Taux directeur bancaire (en pourcentage) = 0,1 x [(10 x M3) /(8 x PIB)] x [(8 x Fonds Propres)]
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C'est-à-dire :
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;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;;M3;;;;;; Fonds Propres
Taux directeur bancaire = ------ x ------------------
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Pour éviter les anticipations sur les variations, je propose que les ajustements de M3/PIB soient annuels et lissés sur un an à compter du premier jour du sixième mois de l'année qui suit l'année mesurée.
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Pour éviter les spéculations stériles sur la date de calcul du ratio Fonds Propres / Encours, je propose que le calcul du ratio Fonds Propres / Encours soit fait chaque mois sur la moyenne des douze mois antérieurs, et applicable au premier jour du mois suivant. Je propose que les encours soient additionnés tous encours confondus, pour maintenir à charge des banques la responsabilité totale de l'arbitrage interne des risques.

Milton Friedman avait proposé un taux de croissance constant de la masse monétaire; ce sytème est trop rigide et néglige la prise en compte des évolutions réelles de la production de valeur.
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Conclusion
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Cette formule est un stabilisateur de la masse monétaire par rapport au PIB. Cette formule est une responsabilisation des banques. C'est aussi l'abandon de l'idée suivant laquelle les manipulations de la monnaie sont un moteur des évolutions économiques. Les règles sont fixées d'avance, sans arbitraire, sans arrière pensée politique de court terme, sans pollution par une idéologie économique. Les banques centrales ne peuvent plus jouer avec les nerfs du marché, et rentrent dans une posture de neutralité technique. Au surplus, la simplicité de la formule est un gage tant de sa propre stabilité que de sa généralisation à toutes les banques centrales.
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Et d'un point de vue plus élevé, nous favorisons ainsi un univers économique où la monnaie est replacée dans sa fonction de représentation de la valeur, et non plus de valeur en soi. La monnaie doit redevenir un outil et sortir de son rôle d'objectif en soi.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Proposer c est ajouté au débat. Mais votre solution pourquoi personne n'y a pensé ni germé dans les têtes bien pensantes de nos économistes et de nos politiques. Car la nuance c est que vous parlez de la situation en FRANCE et peut être voir sûrement en Europe. Mais que faites vous du reste du monde. En un mot c est intelligent mais a mon sens pas trop praticable car le monde est malade de ses bulles financières immobilières. Quand on sait que la production représente une semaine du fric qui circule dans le monde, que fait on des 51 semaines qui restent. C'est donc la crise.

Sylvain JUTTEAU a dit…

Merci pour votre message.

La solution que je propose depuis plusieurs années est précisément en discussion, sous une forme édulcorée, dans les accords bancaires dits de Bâle 3.

J'ai eu plus de rigueur et d'anticipation dans le raisonnement que les économistes payés pour y réfléchir, mais je ne suis pas le seul à y avoir pensé !!

Enfin, je me suis peut être en effet mal exprimé si vous avez compris que ma proposition concerne uniquement la France. Ma proposition est applicable à tous les pays.

Bien cordialement.